Covid-19 : l’administration peut désormais imposer la prise de congés et de jours de RTT
Prise sur le fondement de l’article 11 de la loi no 2020-290 du 23 mars 2020, l’ordonnance no 2020-430 du 15 avril 2020 relative à la prise de jours de réduction du temps de travail (RTT) ou de congés dans la fonction publique de l'État et la fonction publique territoriale au titre de la période d'urgence sanitaire a été publiée hier au journal officiel.
Comme pour le secteur privé, l’administration peut désormais imposer — donc de manière unilatérale — la prise de RTT et de congés à ses agents du fait de la période liée à la propagation du virus covid-19.
En réalité, le texte impose ou permet d’imposer, selon les cas de figure, des jours de RTT et des jours congés annuels aux agents de l’État (qui ne disposent pas par ailleurs d’un statut particulier, comme les enseignants).
En raison du principe de libre administration des collectivités territoriales, l’article 7 de l’ordonnance laisse la possibilité aux collectivités, par décision de l’autorité territoriale et dans les conditions qu’elle définit, d’appliquer ce régime spécifique applicable aux agents de l’État aux agents de leur collectivité. Dans cette hypothèse, les fonctionnaires et agents contractuels de droit public occupant des emplois permanents à temps non complet sont assimilés à des agents publics à temps partiel.
Ainsi, les collectivités sont libres, d’appliquer ou non les dispositions de l’ordonnance no 2020-430. Elles peuvent également moduler le nombre de jours imposés, sans pour autant dépasser le plafond prévu pour les agents de l’État (ci-dessous exposé).
Contestées par des syndicats devant le Conseil d'État, la légalité de ces dispositions a été confirmé par les juges du Palais Royal (CE, 27 avril 2020, no 440150).
L’ordonnance permet de couvrir plusieurs situations, à savoir celle des agents en autorisation spéciale d’absence (ASA) et celle des agents en télétravail.
Les agents en autorisation spéciale d’absence (ASA) se voient imposer la prise de jours
Les agents en ASA entre le 16 mars 2020 et le terme de l'état d'urgence sanitaire déclaré par la loi du 23 mars 2020 (ou, si elle est antérieure, la date de reprise par l'agent de son service dans des conditions normales) doivent prendre dix jours de RTT ou de congés annuels (CA) au cours de cette période, dans les conditions suivantes :
- 5 jours de RTT entre le 16 mars 2020 et le 16 avril 2020. Sont donc ici imposées des RTT de manière rétroactive ;
- 5 autres jours de RTT ou de congés annuels entre le 17 avril 2020 et le terme de la période précitée.
Les personnes en ASA qui ne disposent pas de 5 jours de RTT au titre de la période du 16 mars au 16 avril doivent prendre un ou plusieurs CA entre le 17 avril et la fin de l’état d’urgence sanitaire, dans la limite de six jours.
Le chef de service précise les dates des jours de RTT ou de CA à prendre après le 17 avril en respectant un délai de prévenance d'au moins un jour franc.
À noter que le nombre de jours de congés imposés est proratisé pour les agents exerçant leurs fonctions à temps partiel.
Les agents en télétravail peuvent se voir imposer la prise de jours
Afin de tenir compte des nécessités de service (par exemple en cas de baisse d’activité), le chef de service peut imposer aux agents en télétravail ou assimilé de prendre 5 jours de RTT ou, à défaut, de CA entre le 17 avril 2020 et le terme de l'état d'urgence sanitaire (ou si elle est antérieure, la date de reprise de l'agent dans des conditions normales).
Le chef de service précise les dates des jours de RTT ou de CA pris en respectant un délai de prévenance d'au moins un jour franc.
L’article 3 de l’ordonnance précise que pour les deux cas de figure (agent en ASA ou en télétravail), les jours de RTT pris peuvent l'être parmi ceux épargnés sur le compte épargne-temps.
À noter que les jours de CA imposés ne sont pas pris en compte pour l'attribution d'un ou de deux jours de congés annuels complémentaires au titre du fractionnement des congés annuels.
L’article 4 de l’ordonnance no 2020-430 permet de « mixer » la situation des agents qui ont alterné entre des jours en ASA, en télétravail ou encore sur site.
Ainsi, le nombre de RTT et de congés annuels imposés est proratisé en fonction du nombre de jours accomplis en autorisation spéciale d’absence, en activité normale, en télétravail, entre le 16 mars 2020 et la fin de l'état d'urgence sanitaire ou de la reprise d'activité.
Les RTT et les congés posés volontairement par l'agent sont déduits du nombre de jours imposés.
De même, le nombre de jours de RTT ou congés annuels imposés peut tenir compte des arrêts maladie de l'agent pendant la période déterminée.