« La rupture conventionnelle est désormais une question d’actualité »
Depuis le 1er janvier 2020, les fonctionnaires titulaires ou contractuels en CDI peuvent avoir recours à une rupture conventionnelle pour mettre fin à leur activité dans la fonction publique. Comment se déroule cette nouvelle procédure ? Quelles sont les problématiques auxquelles sont confrontées les collectivités dans sa mise en œuvre ? Éléments de réponse avec Sylvie Baron-Billard, directrice des ressources humaines et des carrières du CDG du Nord.
En quoi consiste la rupture conventionnelle dans la fonction publique territoriale ?
Elle est issue de la loi de transformation de la fonction publique et c’est le décret no 2019-1593 du 31 décembre 2019 qui rend possible l’expérimentation pour les fonctionnaires titulaires jusqu’à la fin de l’année 2025 et l’instaure de manière pérenne pour les fonctionnaires contractuels en CDI. Rappelons que c’est seulement en cas d’accord entre l’agent et son employeur qu’une rupture conventionnelle est possible, elle ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties prenantes.
Dans un premier temps la partie qui souhaite conclure une rupture conventionnelle informe l’autre partie par lettre recommandée avec AR. La démarche est suivie d’un ou plusieurs entretiens préalables à la rupture conventionnelle. Le premier de ces entretiens doit intervenir au plus tôt 10 jours après la réception du courrier et au plus tard un mois après. Cet entretien permet de préciser le motif de la rupture, la date à laquelle l’agent mettra un terme à ses fonctions ainsi que le montant envisagé de l’indemnité de rupture.
Une convention de rupture conventionnelle est ensuite établie et doit être signée au plus tard 15 jours après le dernier entretien. Chacune des 2 parties dispose d’un délai de rétractation de 15 jours après la signature. Car pour un agent titulaire, cela signifie qu’il sera radié des cadres et ne bénéficie plus de son statut de fonctionnaire.
Enfin, les dispositions de l’assurance chômage s’appliquent une fois que l’agent a quitté ses fonctions. Il bénéficie d’allocations qui, à la différence du secteur privé, sont versées en majorité par la collectivité qui l’a employé. Une condition cependant, si l’agent retourne dans la fonction publique moins de 6 ans après avoir bénéficié d’une rupture conventionnelle, il devra rembourser l’indemnité de rupture qu’il a perçue à la suite de la signature de la convention.
Comment s’est passé le début de cette expérimentation pour les collectivités territoriales ?
La rupture conventionnelle est un sujet d’actualité, car si le décret date de la fin d’année 2019 et est entré en vigueur en janvier 2020, il a fallu un peu de temps avant que les collectivités et les agents se saisissent de cette nouvelle possibilité. Il y a eu le confinement et la gestion des missions prioritaires dans le cadre des PCA liés à la crise sanitaire.
Par ailleurs, le décret no 2020-741 apportant des précisions sur les indemnités chômage versées n’est paru qu’en juin dernier. Nous avons ensuite été confrontés à une interrogation de la part des trésoreries qui devaient déclencher les paiements de l’indemnité de rupture conventionnelle. Elles demandaient que la collectivité signataire de la rupture conventionnelle adopte une délibération dans ce sens. Or, le décret publié en juin n’indiquait pas qu’une telle délibération était nécessaire puisque la rupture conventionnelle relève de l’accord entre le ou la fonctionnaire et l’autorité territoriale. Plusieurs réseaux professionnels ont fait remonter cette problématique et la Direction générale des collectivités locales a fini par clarifier les choses en prenant une position officielle indiquant qu’il n’était pas nécessaire que l’exécutif local délibère pour que le comptable public déclenche le paiement. Cette question a été réglée très récemment, début octobre. Désormais, les employeurs publics locaux ont tous les éléments en main pour mener à bien les procédures.
Quel est l’intérêt d’avoir mis en place cette nouvelle procédure dans la fonction publique territoriale ?
La rupture conventionnelle peut avoir un intérêt pour résoudre des situations complexes entre l’employeur et un agent. Mais il est difficile de se prononcer dès maintenant, car l’expérimentation en est à ses débuts. Un bilan doit être effectué d’ici le 31 décembre 2024 pour évaluer les coûts de cette disposition ainsi que le nombre d’agents en ayant bénéficié. Il faudra ensuite déterminer s’il y a un intérêt à maintenir ce dispositif pour les fonctionnaires titulaires.
Nous sommes en lien régulier avec la Direction générale des collectivités locales et nous partageons avec les autres CDG en commission spécifique sur ces questions liées au statut. Nous échangeons entre CDG sur nos expériences, nos pratiques et nos analyses. L’idée étant d’avoir une position et des réponses cohérentes au niveau national afin de venir en appui des collectivités territoriales au niveau local sur ce type de problématiques RH.