« Le télétravail implique un vrai changement des mentalités »
Même s’ils demeurent moins nombreux que les salariés du secteur privé, de plus en plus d’agents publics optent aujourd’hui pour le télétravail. Une pratique encadrée par le décret no 2016-151 du 11 février 2016. Avec 70 % de ses effectifs concernés par le télétravail 1 à 2 jours par semaine, la Région Île-de-France fait figure de pionnière en la matière. Fabienne Chol, DGA en charge des Ressources humaines nous explique comment, en quelques années, un véritable changement des mentalités s’est opéré dans sa collectivité.
Quel est l’intérêt pour une collectivité d’encourager ses agents à télétravailler ?
La mise en place du télétravail au sein de la Région Île-de-France est la meilleure mesure qui a été mise en place en matière de ressources humaines ces dernières années. Je suis totalement convaincue des avantages de cette nouvelle organisation et nous le constatons tout d’abord du point de vue de la santé de nos agents : ce sont en moyenne 2,5 jours de maladie en moins chaque année. Le télétravail c’est aussi moins de stress et de fatigue liés aux transports. Deuxième avantage : le télétravail favorise l’équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle puisqu’il permet d’organiser sa journée de travail en fonction aussi de ses contraintes familiales et personnelles. Enfin, nous savons par toutes les études publiées, que la productivité peut augmenter jusqu’à 20 % en réservant certaines tâches nécessitant du calme et de la concentration aux journées de télétravail.
Comment le télétravail est-il encadré dans votre collectivité ?
Chez nous, il est possible de télétravailler 1 jour, 2 jours ou aucun. La collectivité fixe un cadre de travail général assez vaste et chaque responsable établit ensuite son organisation en fonction des besoins de son service. Il peut choisir d’imposer des jours fixes pour le télétravail ou des jours de présence obligatoire. C’est lui qui donne son accord aux agents qui font la demande de télétravail. Cela implique un changement de la perception du rôle de manager. La relation avec un agent en télétravail est basée sur la confiance. Le responsable fixe des objectifs, il n’est pas considéré uniquement comme une autorité qui contrôle les horaires et les jours de congés. En retour, l’agent est tenu de respecter ses objectifs, mais demeure libre d’organiser sa journée de télétravail comme il le souhaite : horaires, lieu de travail, etc. Notre credo : « en télétravail, je m’organise comme je veux tant que j’atteins mes objectifs et que je ne suis un frein pour personne ». C’est un vrai changement de mentalité : les managers ont eux-mêmes défini leurs valeurs, celles de l’autonomie, de la confiance et du sens du collectif.
Comment avez-vous préparé ce changement ?
La décision de généraliser le télétravail a été prise en janvier 2017. Notre objectif était que tout le monde puisse avoir accès au télétravail. Nous avons donc pris une année pour préparer ce changement, en proposant par exemple pour les agents qui le souhaitaient et dont les métiers ne pouvaient bénéficier du télétravail, de faire évoluer leur fiche de poste. Aujourd’hui 90 % de nos métiers peuvent bénéficier d’au moins 1 journée de télétravail. Des formations obligatoires ont été mises en place de même que des moments d’échanges ente pairs afin que chacun puisse faire part de ses questions et de ses doutes. Nous avons également donné un coup d’accélérateur à la dématérialisation des documents afin de faciliter le travail à distance. Au sein des Ressources humaines, l’ensemble des dossiers des agents ont été dématérialisés, ce qui a représenté 18 mois de travail en amont ! Enfin, d’un point de vue matériel, nous avons profité du déménagement de nos bureaux en Seine–Saint-Denis et du renouvellement de nos outils informatiques pour doter chaque poste de travail d’un ordinateur portable et d’un casque. Résultat, 1 an et demi après, lors des grèves dans les transports au mois de décembre dernier, 95 % de nos agents ont eu recours au télétravail. Nous avons réussi à clôturer les payes de fin d’année et à publier le budget de la collectivité, entre autres, sans accrocs. Pour nous, le bilan est très largement positif.